Le stress, à petites doses, peut être utile à l’adaptation. En fait, il peut être très motivant. Mais à long terme, le stress peut perturber la santé de plusieurs manières. Les études ont associé le stress chronique à plusieurs problèmes de santé, allant des maladies cardiaques au diabète de type 2, la haute tension, les troubles gastro-intestinaux, la dépression, la fibromyalgie et plus encore.
Saviez-vous que le stress est également nocif pour le bon fonctionnement thyroïdien? Avant de voir plus en détails de quelle manière le stress affecte la glande thyroïde, voyons d’abord comment celle-ci fonctionne.
Comment la glande thyroïde fonctionne
La glande thyroïde, un organe qui a la forme d’un papillon, fait partie du système endocrinien. Elle produit les hormones thyroïdiennes, qui sont impliquées dans la régulation de plusieurs fonctions corporelles, telles que le métabolisme, la production de chaleur, le développement cérébral, la respiration, la digestion, la reproduction, la gestion du poids, et plus encore.
La glande thyroïde produit les hormones thyroïdiennes; la thyroxine (T4) et la triiodothyronine (T3), qui sont libérées dans le flux sanguin. L’hypothalamus et la glande pituitaire sont deux glandes cérébrales qui agissent de concert afin de réguler le taux d’hormones thyroïdiennes dans le corps.
- L’hypothalamus sécrète l’hormone thyréotrope (TRH), qui signale à la glande pituitaire de produire davantage de thyréostimuline (TSH)
- La TSH signale à la glande thyroïde de produire davantage d’hormones T4 et T3. Plus de 90 % des hormones produites à ce stade sont sous forme de T4, qui est relativement inactive.
- Lorsque le taux sanguin de T3 et de T4 augmente, la glande pituitaire diminue la production de TSH grâce à un mécanisme de boucle négative.
- La T4 (prohormone inactive) est convertie en T3, qui est plus active, dans divers tissus et organes, tels que le foie, les reins et les intestins.
- La T3 pénètre les cellules à l’aide des récepteurs d’hormones thyroïdiennes, qui sont présents sur les cellules.
Si un problème survient à l’une ou l’autre de ces étapes, cela pourrait résulter en une production, une conversion et une assimilation inadéquates de ces hormones thyroïdiennes. Comme nous allons le voir plus bas, le stress affecte ces voies de plus d’une manière.
L’hypothyroïdie versus l’hyperthyroïdie
L’un des troubles thyroïdiens les plus communs est l’hypothyroïdie, c’est-à-dire la diminution de la production d’hormones par la glande thyroïde. Cela signifie que la plupart des fonctions corporelles dépendant des hormones thyroïdiennes diminuent également – donnant ainsi lieu à des symptômes tels qu’une diminution du rythme cardiaque, la dépression, la fatigue, le gain de poids, une peau et des cheveux secs, une diminution de la sudation et de la constipation. La cause la plus fréquente de l’hypothyroïdie est la maladie de Hashimoto, qui est une maladie auto-immune.
Quant à l’hyperthyroïdie, il s’agit d’une surproduction d’hormones thyroïdiennes. Les symptômes incluent la nervosité, un rythme cardiaque élevé, les mains qui tremblent, de la fatigue, une augmentation de la sudation, des menstruations moins fréquentes ou moins abondantes chez les femmes et des selles fréquentes. L’hyperthyroïdie est surtout causée par la maladie de Grave, également une maladie auto-immune. Nous allons bientôt explorer le lien entre le stress et l’auto-immunité.
Définissons d’abord « stress »
Le stress ne se limite pas aux sentiments négatifs causés par des échéances déraisonnables au travail, la perte d’un emploi, des problèmes financiers ou une séparation amoureuse. Tout changement pouvant altérer la biochimie naturelle de votre corps ainsi que son équilibre interne peut être source de stress. Selon cette définition, les facteurs tels que les déséquilibres du taux de glycémie, la perméabilité intestinale, les infections chroniques, l’exposition aux toxines environnementales et, bien sûr, le régime alimentaire riche en sucre et en aliments transformés peuvent également stresser votre corps. On pourrait donc dire que le stress prend plusieurs formes différentes: il peut être émotionnel, mental, physiologique et même chimique.
Comment le stress contribue aux troubles thyroïdiens
Votre glande thyroïde est extrêmement sensible aux changements et elle est négativement affectée par de nombreux facteurs internes et externes. Et parmi ceux-ci (incluant les maladies génétiques et auto-immunes), on retrouve le stress chronique, qui joue un rôle important.
1. Le stress chronique cause le dysfonctionnement de l’axe HPA
Le stress perturbe la manière dont fonctionne l’axe Hypothalamus-Pituitaire-Adrénal (HPA). L’une des fonctions les plus importantes de l’axe HPA est celle du contrôle de la manière dont le corps réagit au stress.
Lorsque vous êtes stressé, votre axe HPA libère une série d’hormones, telles que le cortisol et l’adrénaline. Ce jet hormonal vous fournit un élan rapide d’énergie, vous rendant ainsi moins sensible à la douleur, tout en augmentant votre taux de glycémie ainsi que votre rythme cardiaque. Ces changements biochimiques ont pour but de préparer votre corps à évaluer et à répondre à la situation stressante le plus efficacement possible (mode lutte ou fuite). Bien entendu, ce jeu hormonal est censé être de courte durée. Une fois que la source de stress n’est plus présente, le corps retourne à son état normal.
Or, que se passe-t-il lorsque vous faites face à une situation stressante après l’autre? Il se produit un flux continu d’hormones du stress, dont le cortisol. Après peu de temps, vos glandes surrénales se fatiguent, ce qui résulte en fatigue surrénale. Voyons de quelle manière le stress surrénal et le taux accru de cortisol affecte les fonctions thyroïdiennes :
- Le stress surrénal chronique perturbe l’axe HPA, atténuant ainsi les fonctions de la glande thyroïde. La hausse du taux de cholestérol diminue la production d’hormone thyroïdienne. L’excès de cortisol altère également la conversion de la T4 inactive en T3 active.
- L’hormone T3 doit être absorbée par les cellules pour fonctionner. Cela se produit avec l’aide des récepteurs présents sur pratiquement toutes les cellules du corps. Mais le stress chronique (et l’augmentation du taux de cortisol) rend ces récepteurs moins sensibles à la T3, ce qui affecte l’assimilation de T3 par les cellules. Cela revient à avoir un taux normal de T3, mais parce que la sensibilité des sites récepteurs est moindre, les cellules ne sont pas réceptives à l’hormone thyroïdienne. C’est ce qu’on appelle résistance thyroïdienne, soit lorsque la cellule développe une résistance à l’hormone thyroïdienne. Les études démontrent que les protéines inflammatoires libérées lorsque stress il y a altèrent la sensibilité des sites récepteurs thyroïdiens. [1]
C’est pourquoi certains patients ne constatent aucune amélioration quant à leurs symptômes d’hypothyroïdie même après la prise de médicaments et même si leur bilan de santé indique un taux normal. Le problème ne se trouve pas au stade de « production », mais plutôt au stade d’« assimilation », dû au stress chronique. Le fait d’accroitre votre dose n’aidera pas si vos récepteurs ne sont pas réceptifs.
2. Le stress chronique surcharge votre système immunitaire
Le stress à long terme crée, de manière générale, un environnement inflammatoire dans le corps. [2] Les événements chroniques de réactions inflammatoires rendent le corps plus susceptible de développer des problèmes de nature auto-immune, tels que le lupus, l’arthrite rhumatoïde, la sclérose en plaque, la maladie intestinale inflammatoire, l’asthme, la dermatite et la thyroïdite de Hashimoto.
Les épisodes prolongés de stress chronique font que votre système immunitaire est surchargé. Un système immunitaire hyper-réactif lance à répétition des réactions inflammatoire et finit par perdre sa capacité à distinguer les cellules saines des cellules indésirables. Votre corps produit alors des anticorps qui se mettent à attaquer les tissus sains, déclenchant ainsi des maladies auto-immunes telles que la thyroïdite de Hashimoto, qui se caractérise par la création d’anticorps qui vont attaquer le tissu thyroïdien.
3. La relation entre le cortisol et l’œstrogène
Parmi ses nombreuses fonctions, le foie est également chargé d’éliminer l’excès d’hormones, dont l’estrogène. Toutefois, un niveau continuellement élevé de cortisol a pour effet d’interférer avec la capacité du foie à éliminer l’estrogène superflus. Les dysfonctions surrénales, causées par stress chronique, peuvent empêcher le foie de bien fonctionner, ce qui diminue sa capacité de détoxication. En effet, les études démontrent que la dépression, l’anxiété et le stress augmentent le risque de maladies hépatiques.
Voici les effets de l’excès d’estrogène :
- Affecte directement la capacité de votre glande thyroïde à produire des hormones
- Empêche le foie de convertir la T4 en T3, la forme d’hormone thyroïdienne que vos cellules peuvent effectivement utiliser pour produire de l’énergie.
- Accroit le taux de globuline liant la thyroxine (TBG) dans le corps. La TBG est l’une des protéines qui se lient aux hormones thyroïdiennes et qui les transportent dans le flux sanguin. Tant que l’hormone thyroïdienne demeure attachée à la TBG, elle est inactive. L’hormone thyroïdienne a besoin de se séparer de la TBG afin de pouvoir se lier et activer les récepteurs thyroïdiens présents sur les cellules. Cela a lieu lorsque les cellules permettent à la T3 de pénétrer à l’intérieur. Trop de TBG en circulation est néfaste, puisque cela ralentirait l’entrée de la T3 dans les cellules.
4. Le stress donne lieu à une mauvaise santé digestive
Le lien entre la santé digestive et la thyroïde est probablement l’une des plus importantes pièces du puzzle, bien qu’elle ne soit pas bien comprise. Il s’agit également de l’un des aspects les plus ignorés. Comment votre santé digestive est-elle liée à votre santé thyroïdienne? De plusieurs manières, si l’on en croit une étude menée en 2011. [3]
Votre système digestif abrite un millier de milliards de bactéries, qui ont une influence sur votre immunité, votre digestion, votre métabolisme et votre santé globale. Cette flore bactérienne est un mélange de bonnes et de mauvaises bactéries. L’équilibre entre ces deux populations est la clé d’une bonne santé. En fait, 80% de votre système immunitaire réside dans votre système digestif.
Dysbiose digestive, perméabilité intestinale et connexion auto-immune :
Le stress continu peut épuiser vos réserves de bonnes bactéries, ce qui crée un déséquilibre dans la flore bactérienne (dysbiose digestive). Ce déséquilibre menace l’intégrité de la paroi intestinal – ce qui donne lieu à une myriade de problèmes de santé, dont de l’inflammation et de la perméabilité intestinale.
Votre paroi intestinale agit comme barrière protectrice, qui permet aux nutriments de passer, tout en gardant un œil sur les substances toxiques. Mais avec un intestin perméable, les jonctions étroites de la paroi intestinale se rompent, formant ainsi des trous qui permettent aux protéines non digérées et aux toxines (ainsi que d’autres éléments indésirables) de pénétrer le flux sanguin. Sachant que ces substances ne doivent pas se retrouver dans la circulation sanguine, votre corps rétorque immédiatement en attaquant. Les réactions immunitaires fréquentes résultent en la formation d’anticorps qui se mettent à détruire les tissus mêmes du corps, dont la thyroïde.
Santé digestive et conversion de la T4 en T3
Votre glande thyroïde produit la T4 et la T3, mais elle produit davantage d’hormone T4, qui est inactive. La T4 est convertie en T3 active dans les tissus et organes tels que les intestins, les reins et les muscles squelettiques. La T3 est la forme utilisée par les cellules.
Près de 20 pourcents de la T4 est converti en T3 dans les intestins. Les bonnes bactéries qui s’y trouvent fournissent une enzyme spécifique nécessaire à cette conversion. La dysbiose bactérienne, déclenchée par le stress chronique ainsi que tout un tas d’autres facteurs, altère cette conversion – ce qui résulte en une carence sanguine en T3. Il n’est donc pas surprenant que les personnes qui ont une mauvaise santé intestinale présente des symptômes caractéristiques des troubles thyroïdiens.
Santé digestive et absorption des nutriments
Encore une fois, la mauvaise santé intestinale empêche le corps d’absorber efficacement les nutriments. Les nutriments tels que l’iode, le sélénium, le magnésium, la vitamine B12, le zinc et la vitamine D jouent un rôle important dans le sain fonctionnement thyroïdien.
Par exemple, vous avez besoin de magnésium, de zinc et de vitamine B12 pour produire de la TSH. Les minéraux tels que le sélénium et le zinc favorisent la conversion de T4 en T3. Vous avez besoin de la vitamine D et de la vitamine A pour aider la T3 à se lier aux récepteurs des cellules. Si votre corps a une carence en l’un de ces nutriments, plusieurs processus liés au métabolisme de l’hormone thyroïdiennes en souffrent. En effet, une étude de 2015 a démontré qu’un faible taux de vitamine D est associé à un faible taux de TSH ainsi qu’à un taux élevé d’anticorps thyroïdiens – ce qui est fréquent chez les personnes souffrant des maladies de Graves et de Hashimoto. [4]
5. Le stress accroît le taux de glycémie
Le stress chronique et le cortisol qui en résulte causent une hausse abrupte de votre taux de glucose sanguin. Les études montrent que « le stress peut indirectement influencer le développement du diabète de type 2 en favorisant l’obésité ainsi que le syndrome métabolique. » [5]
Le débalancement du taux de sucre causé par un stress prolongé peut également affecter votre thyroïde. Le lien entre le diabète et les maladies thyroïdiennes est bien établi. Le mauvais métabolisme du glucose peut affecter les fonctions de la glande thyroïdienne, ce qui peut donner lieu à de la résistance à l’insuline. [6] [7]
Un haut taux de sucre contribue également à de l’inflammation chronique, qui constitue un énorme facteur de risque de maladies thyroïdiennes auto-immunes.
La chose importante à retenir ici, c’est que le traitement conventionnel pour la thyroïde doit être accompagné de stratégies qui permettent de diminuer le stress chronique. Et souvenez-vous que le stress peut provenir de n’importe où. À long terme, les carences alimentaires, les troubles digestifs, les infections persistantes, le mauvais régime alimentaire, le manque de sommeil et la détresse émotionnelle peuvent tous être source d’un immense stress pour votre corps, altérant ainsi son harmonie globale. Le fait de faire face à ces problèmes de manière intégrale devrait faire partie de la stratégie de gestion des troubles thyroïdiens.
Références :
- Kimura et al. Chemokine orchestration of autoimmune thyroiditis. Thyroid. 2007
- Cohen et al. Chronic stress, glucocorticoid receptor resistance, inflammation, and disease risk. PNAS. 2012.
- Konturek et al. Stress and the gut: pathophysiology, clinical consequences, diagnostic approach and treatment options. J Physiol Pharmacol. 2011
- Arslan et al. Isolated Vitamin D Deficiency Is Not Associated with Nonthyroidal Illness Syndrome, but with Thyroid Autoimmunity. The Scientific World Journal. 2015.
- Marcovecchio et al. The effects of acute and chronic stress on diabetes control. Sci Signal. 2012
- Hage at al. Thyroid Disorders and Diabetes Mellitus. Journal of Thyroid Research. 2011
- Gierach M et al. Insulin resistance and thyroid disorders. Endokrynol Pol. 2014
Tendances thyroïdiennes non détectées par les examens standards
Vous prenez des médicaments pour votre hypothyroïdie, mais vous présentez toujours des symptômes tels que des douleurs musculaires, de la fatigue, une prise de poids, une perte de cheveux, la dépression, la sensation d’avoir l’esprit embrouillé et de la difficulté à perdre du poids. Votre médecin vous a demandé de refaire des analyses sanguines afin de déterminer quel est votre taux d’hormones thyroïdiennes, mais ce dernier est normal. Est-ce que cela signifie que vos fonctions thyroïdiennes sont normales? Ces symptômes seraient-ils d’origine psychologique tout simplement?
Un examen standard pour la thyroïde consiste en l’analyse de la thyréostimuline (TSH) et de la T4. Mais la normalité du taux de ces hormones ne prédit pas toujours la santé de la glande thyroïde, cette petite glande en forme d’un papillon située à la base du cou.
La glande thyroïde sécrète les hormones thyroïdiennes T3 et T4, qui sont chargées de la régulation de plusieurs processus biologiques, dont le niveau d’énergie, le métabolisme, la température corporelle, la digestion, la reproduction et plus encore. Lorsque l’hypothalamus (une partie du cerveau) sent que le taux de T3 et de T4 dans le sang est faible, il sécrète l’hormone thyréotrope (TRH), qui envoie un signal supplémentaire à la glande pituitaire afin qu’elle produise de la thyréostimuline (TSH). Le rôle de la TSH est de dire à votre glande thyroïde de produire de la T3 et de la T4. Votre glande thyroïde est très sensible et ses fonctions sont influencées par divers facteurs, tels que votre santé surrénale, votre santé intestinale et votre statut nutritionnel. Comment tout cela s’accorde-t-il ?
Le fait est que la santé des fonctions thyroïdiennes n’est pas seulement une question de production de bonnes quantités de TSH, de T3 et de T4. La T4 doit être convertie en T3, qui est la forme active de l’hormone. De plus, la T3 doit être bien absorbée par les cellules. Ces processus peuvent être perturbés par le stress, la fatigue surrénale, le syndrome de l’intestin perméable et les carences nutritionnelles. Il y a de fortes chances que votre médecin n’explore pas ces facteurs pour déterminer si vous êtes en bonne santé thyroïdienne ou pour trouver la réelle cause de vos symptômes hypothyroïdiens. Outre la TSH, la T3 et la T4, d’autres marqueurs, tels que la T3 libre et la T3 inverse, peuvent fournir des indications utiles quant à votre santé thyroïdienne. Malheureusement, ces marqueurs sont généralement ignorés et ne figurent pas parmi les éléments examinés dans les analyses standards.
Votre médecin a-t-il analysé votre taux de T3 libre ?
Votre glande thyroïde produit la T4 ainsi que la T3, mais pas en quantités égales. Environ 90 pourcents de ce qui est produit est de la T4, qui est inactive. Le corps a besoin de convertir cette T4 inactive en T3 active, qui est précisément ce dont vos cellules ont besoin.
Au départ, la T3 est attachée à la globuline liant la thyroxine (TBG), une protéine qui transporte l’hormone dans le flux sanguin. La T3 a besoin de se détacher de la TBG pour qu’elle puisse se lier aux récepteurs d’hormones thyroïdiennes présents sur pratiquement toutes les cellules. Il s’agit de la T3 libre, dont vos cellules ont besoin et qu’elles peuvent utiliser.
Est-ce que votre T4 se convertit bien en T3 ?
La T4 est convertie en T3, la forme active de l’hormone thyroïdienne que vos cellules peuvent utiliser. La conversion inadéquate de la T4 en T3 pourrait être une des raisons pour lesquelles vous ne réagissez pas bien aux médicaments qui vous ont été prescrits. Dans pareil cas, la personne a un taux normal de TSH et de T4, mais présente quand même des symptômes d’hypothyroïdie.
Plusieurs facteurs peuvent influencer négativement ou interférer avec cette conversion essentielle :
- Haut taux de cortisol : cela peut être causé par l’inflammation et le stress chroniques
- Dysbiose intestinale : les microbes intestinaux produisent l’ensemble d’enzymes deiodinases, chargé de convertir la T4 en T3. Une mauvaise santé intestinale décroît le taux de bonnes bactéries, ce qui réprime le processus de conversion.
- Carences nutritionnelles : les minéraux tels que le fer et le sélénium sont nécessaires à l’activation d’enzymes essentiels à la conversion de la T4 en T3. Une carence en ces minéraux affecte négativement cette conversion.
La dominance oestrogénique et la mauvaise santé hépatique peuvent également avoir un impact sur le processus de conversion. Un autre élément doit également être analysé, mais il est souvent ignoré lors des analyses thyroïdiennes standards : votre taux de T3 libre, qui est nécessairement faible si la T4 n’est pas convertie en T3.
Qu’en est-il de votre taux de TBG ?
Haut taux de TBG
Tel que mentionné ci-dessus, l’hormone T3 ne peut voyager dans le flux sanguin de façon autonome. Elle a besoin d’aide, et c’est le rôle que joue la TBG. La T3 se lie à cette protéine de transport afin de rejoindre les cellules et les tissus. À ce stade, la T3 est encore inactive. Elle a besoin d’être libérée de la TBG, ce qui se produit une fois qu’elle atteint les cellules et se lie aux récepteurs. Donc qu’est-ce qu’un taux élevé de TBG indique? Cela signifie que votre corps a un faible taux de T3 active ou libre, ce qui donne lieu à de l’hypothyroïdie.
Qu’est-ce qui peut accroître votre taux de TBG? Cela est principalement causé par un haut taux d’estrogène dans le corps. La production de progestérone chez les femmes commence à décliner lorsqu’elles atteignent la fin de la trentaine. Cela donne lieu à une hausse du taux d’estrogène avec l’âge chez les femmes. L’usage prolongé des pilules anticonceptionnelles ainsi que l’hormonothérapie substitutive sont les deux autres principales causes de la dominance oestrogénique.
Cela peut également être causé par le stress, le dysfonctionnement hépatique et l’exposition à long terme à des substances chimiques que l’on retrouve généralement dans le plastique, les shampoings, les crèmes et les lotions. Ces substances chimiques, appelés xénoestrogènes, perturbent le fonctionnement des glandes endocriniennes et créent des débalancements hormonaux.
Faible taux de TBG
Donc un haut taux de TBG résulte en une quantité réduite d’hormones thyroïdiennes libres ou actives. L’inverse est aussi vrai; un faible taux de TBG résulte en une hausse soudaine du taux d’hormones thyroïdiennes libres. Une trop grande quantité d’hormones en circulation dans le flux sanguin rend vos cellules résistantes à leurs effets. Cela est très similaire à la résistance à l’insuline, soit la situation où un taux anormalement élevé d’insuline circulant dans le flux sanguin rend vos cellules résistantes à cette dernière.
Avec la résistance thyroïdienne, vos cellules ne peuvent utiliser les hormones thyroïdiennes malgré leur abondance. Autrement dit, vous avez les hormones, mais elles ne peuvent pénétrer dans vos cellules, ce qui donne lieu aux symptômes caractéristiques de l’hypothyroïdie. Le faible taux de TBG peut être causé par un taux élevé de testostérone, la résistance à l’insuline, un déséquilibre du taux de sucre et le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK).
Mais la résistance à l’insuline pourrait comporter une autre conséquence sous-jacente : activité réduite des récepteurs de T3. Comme nous le savons, l’hormone T3 se lie aux récepteurs cellulaires afin d’y pénétrer. Toutefois, des facteurs tels que le stress, un haut taux de cortisol et des carences en nutriments tels que le zinc, la vitamine A et les acides gras peuvent interférer avec le bon fonctionnement des récepteurs T3. De plus, les mutations génétiques peuvent également affecter les fonctions de ces récepteurs. Donc dans ce cas-ci, vous avez les hormones thyroïdiennes, mais les récepteurs ne fonctionnent pas suffisamment bien pour les laisser pénétrer, ce qui donne lieu à une trop grande quantité d’hormones en circulation.
Les dysfonctions pituitaires ou la fatigue surrénale pourraient-elles être coupables ?
La santé de vos glandes surrénales fait partie intégrante de votre santé thyroïdienne. Le stress à long terme, les infections chroniques, les maladies métaboliques et le manque de sommeil sont tous des facteurs pouvant stresser vos glandes surrénales, causant ainsi de la fatigue surrénale.
Lorsque vous êtes stressé, vos glandes surrénales produisent davantage de cortisol. Le cortisol affecte vos fonctions thyroïdiennes de plusieurs manières :
- Un niveau élevé de stress et de cortisol affecte la glande pituitaire, soit une glande qui sécrète de la TSH. Or si vous souffrez de dysfonctionnement pituitaire, votre taux de TSH sera insuffisant, la TSH étant chargée de stimuler la glande thyroïde afin de produire de la T4 et de la T3.
- Le stress chronique et un taux élevé de cortisol altèrent la conversion de la T4 inactive en T3 active. La raison pour cela est généralement parce qu’en temps de stress, le corps a besoin de ralentir son métabolisme ainsi que plusieurs autres processus biologiques pour se guérir et se réparer.
- Le stress et le cortisol sont également la cause d’un déséquilibre du taux de sucre. Le haut taux de sucre affecte vos fonctions thyroïdiennes.
- Le stress contribue à la dysbiose intestinale ainsi qu’au syndrome de l’intestin perméable, ce qui non seulement perturbe la conversion de la T4 en T3, mais cause également de l’inflammation systémique, l’un des plus grands facteurs de risque de maladies auto-immunes telles que la maladie d’Hashimoto.
- Le stress accroît également le taux d’estrogène, et un haut taux d’estrogène accroit le taux d’une protéine appelée « globuline liant la thyroxine » (TBG). Nous avons déjà discuté, dans la section précédente, du rôle de la TBG et de la manière dont le haut taux de TBG est source de problèmes.
Une étude récente menée en 2018 a conclu que le « syndrome de stress post-traumatique (SSPT) est associé à un plus grand risque d’hypothyroïdie. Une plus grande sensibilisation aux dysfonctions thyroïdiennes pourrait s’avérer particulièrement important pour les femmes souffrant de SSPT. » [1]
Avez-vous fait analyser votre taux de T3 inverse ?
Votre corps produit une autre hormone: la T3 inverse (rT3). Une partie de la T4 produite par votre glande thyroïde est convertie en rT3 par votre foie. Cependant, il peut arriver que le corps produise plus de rT3 qu’à la normale. Cela a généralement lieu lorsque le corps a besoin de conserver son énergie afin de récupérer à la suite d’événements stressants ou d’un traumatisme. L’inflammation chronique et les infections, l’exposition à des températures extrêmes, la détresse émotionnelle ainsi que la maladie cœliaque accroissent le taux de rT3.
Bien que le corps soit équipé pour gérer de faibles quantités de rT3, qu’il produit naturellement d’ailleurs, les quantités excessives de rT3 font concurrence à la T3 ainsi qu’à sa capacité à se lier aux récepteurs d’hormones thyroïdiennes. Cela finit par donner lieu à une assimilation réduite de T3 par les cellules, ce qui cause les symptômes d’hypothyroïdie.
Avez-vous une maladie auto-immune ?
La plupart des cas d’hypothyroïdie sont causés par la maladie d’Hashimoto. Il s’agit d’une maladie auto-immune qui se caractérise par la production par le système immunitaire d’anticorps qui attaquent et détruisent la glande thyroïde, endommageant ainsi sa capacité à produire des hormones thyroïdiennes. Bien que la génétique joue un rôle clé dans votre susceptibilité de développer une maladie auto-immune, l’inflammation chronique, le syndrome de l’intestin perméable, les allergies alimentaires, les infections et le stress peuvent également vous mettre à risque.
Vous prenez des médicaments pour la thyroïde mais vous ne vous sentez pas mieux ?
Vous prenez des médicaments pour la thyroïde qui accroissent votre taux d’hormone thyroïdienne, mais cela n’améliore pas votre situation? La question est : à quoi sert un taux suffisant d’hormones thyroïdiennes lorsque vous n’êtes pas capables de convertir la T4 en T3? Et si vos cellules avaient développé une résistance aux hormones thyroïdiennes en raison du faible taux d’hormone TBG ou de l’activité réduite des récepteurs T3? Dans de tels cas, le fait de suivre une hormonothérapie thyroïdienne substitutive importe peu.
Non seulement votre corps a besoin de produire des hormones thyroïdiennes, mais il doit également être en mesure de les utiliser efficacement. Sinon, votre niveau d’énergie demeurera faible et vous continuerez à avoir des problèmes de poids, à vous sentir fatigués et à avoir une longue liste de symptômes caractéristiques de l’hypothyroïdie. Et cela pourrait avoir lieu même si vos analyses sanguines ne l’indiquent pas. Et que se passe-t-il lorsque vos analyses indiquent que le niveau de votre TSH, T3 et T4 est « normal »? Eh bien, il est probable que votre médecin accroisse la dose de vos médicaments. Mais cela ne règle pas le problème.
Le problème est que la plupart des médecins traditionnels ne reconnaissent pas les tendances thyroïdiennes dont nous avons discuté dans cet article. Nous ne nions pas le rôle que joue l’hormonothérapie thyroïdienne substitutive, toutefois, le fait de comprendre les facteurs qui perturbent votre physiologie thyroïdienne et de faire des efforts pour gérer et éliminer ces problèmes peut aider à améliorer votre santé et vos fonctions thyroïdiennes.
La gestion de votre santé thyroïdienne est importante
Les troubles thyroïdiens ne sont pas un problème isolé. Ils peuvent accroître votre risque d’autres problèmes de santé. Les personnes souffrant de dysfonctions thyroïdiennes sont à risque accru de fibromyalgie, d’infertilité, de glycémie élevée et de résistance à l’insuline, de maladies cardiaques, de dépression et de plusieurs maladies auto-immunes.
Le fait d’ignorer vos symptômes ou de continuer à prendre vos médicaments pour la thyroïde bien que cela ne donne aucun résultat détériora davantage votre santé. Que pouvez-vous faire?
- Mangez sainement et faites de l’exercice régulièrement
- Diminuer l’inflammation
- Prenez soin de votre santé digestive et traitez le syndrome de l’intestin perméable à l’aide d’un bon régime alimentaire et de suppléments
- Emboîtez le pas vers une diminution de votre niveau de stress
- Assurez-vous d’avoir un bon statut nutritionnel. Les vitamines telles que le sélénium [2], le zinc [3], le fer, le magnésium et la vitamine D [4] jouent un rôle très important dans le maintien de la bonne santé thyroïdienne.
- Vous souffrez d’une infection chronique ? Ne la laissez pas s’enraciner, puisque les infections stressent vos glandes surrénales et causent de l’inflammation.
- Maintenez votre glycémie à un niveau normal
- Identifiez vos allergies alimentaires
- Dormez bien
- Perdez du poids
Toutes ces interventions auront non seulement pour effet d’améliorer les paramètres directement liés à votre santé thyroïdienne, mais ils vont également agir de concert afin de maintenir votre bonne santé globale.
Références :
- Jung et al. Posttraumatic stress disorder and incidence of thyroid dysfunction in women. Psychological Medicine. 2018.
- Ventura et al. Selenium and Thyroid Disease: From Pathophysiology to Treatment. Int J Endocrinol. 2017
- Betsy et al. Zinc Deficiency Associated with Hypothyroidism: An Overlooked Cause of Severe Alopecia. Int J Trichology. 2013
- Kim et al. Low vitamin D status is associated with hypothyroid Hashimoto’s thyroiditis. Hormones (Athens). 2016